Deux systèmes s’observent dans les hôpitaux.
Le plus répandu, de loin, est celui de la complémentation (1). Les fréquences de commande sont fixes (tous les mardis par exemple) et c’est la quantité commandée qui fluctue. Cette quantité est théoriquement déterminée par un inventaire précis du stock restant dans l’unité de soins, que l’on compare à une dotation « type » (« Ma dotation est de 100, il m’en reste 20, donc j’en commande 80 »). Ce système repose sur des inventaires systématiques et rigoureux. Les écueils sont alors nombreux et mettent à mal le système : « Je n’ai pas le temps de faire l’inventaire : on va commander comme la semaine dernière », « Ma dotation est de 100, il m’en reste 20, mais j’en commande quand même 100, car on ne sait jamais… », « Ma dotation est de 100, mais elle est obsolète, j’ai besoin de 200 pour fonctionner pendant une semaine », etc. Heureusement, certains établissements pallient ces difficultés en mettant à jour les dotations régulièrement, en aménageant des stocks faciles à compter ou en faisant réaliser ces inventaires par des agents logistiques lorsqu’ils en ont les moyens.
Le second système, plus récent, est celui dit du Plein-Vide (2). L’adaptation, par les hôpitaux, du très connu système de seuil de commande (ou « Kanban »). Cette fois-ci, c’est la quantité qui est fixe mais le déclenchement qui est aléatoire puisqu’il a théoriquement lieu au moment, imprévisible, où le seuil sera atteint (à la moitié de la dotation dans le cas du plein-vide). Ce système permet entre autres de s’affranchir des inventaires systématiques. Mais son principal écueil dans les organisations hospitalières est qu’il s’agit en réalité d’un faux Kanban. Pour des raisons historiques d’organisation des fonctions logistiques, le relevé des « demi-bacs » vides n’a en réalité pas lieu à tout moment, mais au contraire, lors de relevés et de livraisons organisées à intervalle fixe dans les unités de soins (2 ou 3 fois par semaine par exemple). Appliqué comme tel, le système « Plein-Vide » n’est rien d’autre qu’un système de complémentation rendu plus simple (plus besoin d’inventaires systématiques), mais nécessitant davantage d’équipements (les demi-bacs) et davantage de surfaces de stockage, puisque la demi-dotation doit permettre de tenir jusqu’au prochain relevé, souvent trop lointain !
Aucun de ces deux systèmes n’est actuellement satisfaisant et l’approvisionnement des unités de soins dans les hôpitaux reste un casse-tête. Le nombre de demandes urgentes ou de ruptures de stock en témoigne chaque jour ! Les stocks dans les unités sont régulièrement « retoqués » par les commissaires aux comptes. Pourtant, créé dans les usines Toyota en 1950, le système de « KANBAN » est la meilleure solution d’approvisionnement en flux tiré des unités de production, quelles qu’elles soient. Il suffirait pour cela d’appliquer avec rigueur le plein-vide et surtout de disposer d’une fréquence de distribution réellement variable et réactive.